D’une fracassante entrée dans le monde

Il y a quelques jours, j’ai fini de lire « Victorian Fantasy – Dentelle et nécromancie », tome 1, de Georgia Caldera.

Victorian Fantasy

Le résumé: « D’aussi loin que remontent ses souvenirs, Andraste, issue d une longue lignée de sorcières, vit dissimulée aux yeux du monde. Son univers restreint ressemble à s’y méprendre à une cage dorée, elle qui ne rêve que de s’envoler. C’est alors qu’une invitation de la main même de la Reine vient bousculer les plans de sa grand-mère qui dirige la famille d’une main de fer. Et une requête royale ne se refuse pas… à moins de souhaiter perdre la tête.
Sa découverte du monde commence, à mille lieues de ce qu’elle imaginait. La cour est pleine de dangers, de rumeurs et de règles qu’elle ne maîtrise pas.
Mais sa plus grande erreur est de succomber au regard aussi noir que la nuit de lord Thadeus Blackmorgan… »

J’avais choisi ce titre un peu par hasard en cherchant à m’éloigner de mes lectures habituelles et en espérant trouver un roman fantasy aux accents steampunk convainquant, et j’avais plutôt bon espoir d’avoir mis le doigt sur un coup de cœur. Je suis malheureusement assez vite redescendue de mon nuage…

Andraste, l’héroïne, est un personnage qui attire en premier lieu la compassion. Ayant grandi au sein d’une famille matriarcale ( entièrement composée de ses tantes, sœurs et cousines, et dirigée par son énigmatique grand-mère Helen ) et confinée depuis sa naissance entre les 4 murs du coven, elle ne connait rien du monde extérieur. Son apparence particulière, ses cheveux blancs et ses yeux violets notamment, sont les signes visibles de sa fragile constitution, et la cause principale de l’extrême attention que lui voue son entourage et de sa mise à l’écart. On lui répète en effet depuis toujours qu’elle craint le soleil, qu’il peut même lui être fatal, et qu’elle doit à tout prix le fuir. Et, jusqu’à ce jour où, sans que personne ne sache ni comment ni pourquoi, elle reçoit une invitation de la part de la Reine – autorité suprême s’il en est -, sa vie n’était remplie que par de rébarbatives leçons de sorcellerie et de trop rares sorties de nuit dans un petit jardin.
On ne peut donc qu’être touchée par sa condition et ravie pour elle qu’une occasion se présente enfin de faire son entrée dans le monde. Monde qui à toutes les caractéristiques de l’Angleterre de l’époque victorienne, la présence de la magie et d’animaux mécaniques en plus.

L’intérêt premier du roman tient donc dans la découverte du palais et de ses codes par la candide Andraste.
A peine arrivée, et poussée par une irrépressible envie de liberté, elle se perd dans les innombrables méandres du royal bâtiment et se retrouve, sans trop savoir comment, dans les douches du quartier des domestiques. C’est là qu’elle fait la rencontre qui va bouleverser sa tranquille existence. Elle tombe en effet sur un homme mystérieux bien décidé à mettre fin à ses jours, et, émue par sa situation, met tout en œuvre pour l’en empêcher, quitte à y laisser sa pudeur et… sa virginité. Quelle n’est pas sa surprise, le lendemain matin, lorsqu’elle se rend compte que l’homme en question n’est autre que son professeur de nécromancie et l’un des personnages les plus puissants du royaume: Lord Thadeus Blackmorgan.
Voilà en quelques mots le postulat de départ du récit… et le début des ennuis, autant pour notre héroïne que pour le lecteur.

On suit donc au fil des pages l’évolution d’Andraste dans ce monde où tout est nouveau pour elle, où elle pense de prime abord ne pas avoir sa place, sa découverte de la réalité de sa condition ( elle est en fait supposée être une Élue, détentrice du double pouvoir de sorcière et nécromancienne ), le rôle qu’elle est amenée à jouer, et ses joutes verbales avec son amant/professeur. Et c’est là que le bât blesse.
Je m’explique: l’univers dans lequel l’auteure a choisi de faire évoluer ses personnages a beaucoup de potentiel – un monde où règne la magie, aux accents steampunk et répondant à tous les codes de l’époque victorienne, c’était ultra prometteur -,mais il n’est absolument pas exploité. En dehors de quelques rapides descriptions du château, de la capitale et, surtout, de la mode, on n’apprend rien, rien du tout, et, du coup, notre imagination s’en trouve méchamment frustrée. L’évocation des animécaniques nous met l’eau à la bouche, on en demande plus, mais… rien.
Georgia Caldera a pris le parti de faire passer la romance au premier plan, la mettant notamment en avant à grand renfort de scènes sexuellement explicites qui, à mon humble avis, n’apportent rien au récit. L’histoire entre Andraste et Thadeus, qui ne nous surprend à aucun moment vu qu’ils couchent ensemble au tout début du livre ( choix narratif audacieux mais risqué ), éclipse tout le reste.
Les 100 premières pages sont plutôt agréables, on découvre avec plaisir les personnages et on devine leur environnement, mais les 250 suivantes sont on ne peut plus redondantes. Nos deux personnages principaux passent leur temps à jouer au chat et à la souris, à « je te suis tu me fuis, je te fuis tu me suis », à un tel point que ça frise la bipolarité, et j’ai à plusieurs reprises dû lutter pour ne pas abandonner la lecture. Andraste se révèle finalement être un personnage sans grand relief, dont la naïveté et la propension à la soumission deviennent vite agaçantes, et Thadeus est profondément antipathique. Ce dernier n’hésite pas à manipuler, contraindre et même violenter celle qui pourtant l’attire et le fragilise, et l’auteure lui trouve toutes les excuses possibles ( à croire qu’elle n’a aucune fibre féministe ). Et face à ce monstre d’égoïsme et de machisme, Andraste se tait, accepte et, comble de l’insupportable pour moi, en redemande, sous prétexte qu’il exerce sur elle un magnétisme incontrôlable. ça a réellement été dur pour moi de ne pas jeter le livre à travers la pièce! ( oui oui, à ce point )
Finalement, au bout de 340/350 pages, et contre toute attente, l’histoire finit par décoller et on a enfin droit à de l’action. Le récit devient palpitant et on tourne les pages avec plaisir. La tension est présente, le suspens aussi, et la magie, jusque là en filigranes, occupe enfin la place qui lui est due. Et, ce n’est pas rien, Andraste devient enfin un personnage fort, qui prend son destin en main et cesse d’être une sorcière potiche.

J’ai donc, vous l’aurez compris, été très déçue par ce roman. Présenté comme un livre de style fantasy – c’est même dans le titre -, pouvant faire penser par certains aspects à « Harry potter », il s’agit en fait d’une pâle romance érotico-fantasy. Ajoutez à ça le fait que j’ai trouvé le style de l’auteure assez poussif, et vous devinerez facilement qu’en ce qui me concerne ce sera un one shot: je ne lirai pas les tomes suivants.

8 commentaires sur “D’une fracassante entrée dans le monde

  1. Oh dommage! Bon déjà les romances ce n’est pas trop mon truc… mais j’avais bien aimé le premier tome des Larmes rouges du même auteure, donc peut-être que j’apprécierais quand même ce livre si je tente!

    J’aime

  2. Dommage que tu n’ai pas apprécié ta lecture, de mon côté j’ai beaucoup aimé…
    Mais il en faut pour tout le monde après tout ^^

    J’aime

  3. Bon déjà que je n’étais pas particulièrement attiré par cette saga, je vais sans aucun doute passer mon tour ! Je pense que cela va m’éviter de m’énerver sur l’histoire, surtout si elle n’est pas exploitée comme il faut et les scènes sexuelles qui n’apportent rien.

    J’aime

    1. Beaucoup l’ont apprécié apparemment, mais pas moi. Je pense que l’auteure est passée à côté de son roman, c’est dommage. Qui sait, peut-être que la suite sera plus réussie?…

      J’aime

Laisser un commentaire